Sunday, December 06, 2015

Le discours de Kabila, une voie vers le glissement ?

Le discours de Kabila, une voie vers le glissement ?
par Kambale Musavuli

En moins d’une année, ( Novembre 2016) la République démocratique du Congo ( DRC) va tenir des élections présidentielles et législatives. Cependant un nombre important d’incertitudes entoure l’organisation de ces élections, qui devraient de toute évidence  déboucher sur un nouveau président et marquer la première transition  paisible du pouvoir dans l’histoire du pays.  Le principal parti d’opposition du Congo, l’Union pour la démocratie et le progrès social [Union for Democracy and Social Progress (UDPS)] a tenu des pourparlers avec le régime de Kabila afin d’organiser un dialogue national qui devrait comme nous l’espérons éviter la détérioration de la crise électorale actuelle.
(qui a été orchestrée par le régime de Kabila).

Le Président Kabila s’est adressé à la nation le samedi 28 novembre afin d’aborder le sujet du dialogue national. Plus tôt la même journée, le gouvernement de Kabila arrêtait une dizaine d’activistes à Goma. Ils marchaient paisiblement afin d’attirer l’attention sur  l’inadmissible perte de vie de la ville de Beni. Kabila a souligné cinq priorités pour la planification du dialogue national dans son discours à la nation.

1.    La crédibilité des listes électorales
2.    Le calendrier électoral
3.    La sécurité du processus électoral
4.    Le financement des élections
5.    Le rôle des partenaires internationaux

Le discours de Kabila a été marqué principalement par ce qu’il n’a pas dit. Il est resté silencieux sur la question de la fin de son mandat après décembre 2016, après l’achèvement de son second terme de cinq années comme défini dans la constitution du Congo. Kabila n’a pas précisé une date pour le dialogue, il s’est simplement référé à l’organisation d’un comité préparatoire. Il n’a pas assumé de responsabilité d’aucune sorte pour l’état actuel des affaires. Ce sont en fait Kabila et sa coalition majoritaire qui ont conduit à l’actuelle crise politique. 

Le discours du Président Kabila  était plus dans la ligne des mouvements récents qu’il a fait pour consolider  le pouvoir dans le cadre de sa présidence. Il a dit que le dialogue devrait prendre en considération des méthodes moins coûteuses d’élection. Pour beaucoup c’est le signal que Kabila a l’intention d’envisager des élections indirectes  à la place du vote populaire direct mandaté constitutionnellement.  Un regard détaché à l’histoire de Kabila révèle une perversion constante des lois nationales et de la réforme de la constitution afin de préserver et de consolider son pouvoir. L’exemple clef est la réforme constitutionnelle de 2011, qui a changé les élections présidentielles de deux tours à celle d’un tour où l’élu emporte tout, ce qui permet à un candidat de gagner la présidence avec moins de cinquante pour cent des votes.

Kabila s’adresse rarement au people congolais, ce discours est l’un parmi les rares où il a parlé directement à la nation cette dernière année. Il a pu être poussé à le faire et à faire face à la question du dialogue national à cause des pressions de l’UDPS. La tête de l’UDPS a posé un date limite le 30 Novembre pour organiser le dialogue nationale à défaut de quoi ils retireraient leur participation. 

La lentille à travers de laquelle on peut regarder le discours de Kabila est dans le contexte de ses essais effrénés pour rester au pouvoir à n’importe quel prix. L’organisation du dialogue national est la dernière et la probablement la plus faible tentative pour sécuriser un minimum de légitimité pour son maintien au pouvoir. Quelques unes des stratégies de Kabila pour rester au pouvoir comprennent 1. Amendement à la constitution – pendant les neuf premiers mois de 2014, il est apparu que c’était le principal moyen de Mr. Kabila pour rester au pouvoir. Sa coalition majoritaire a même essayé de forcer un amendement à la constitution  par l’intermédiaire du parlement en Septembre 2014 mais a échoué. Des forces consistantes et importantes à travers le Congo ( Société civile, Eglise catholique, opposition, jeunesse)  ainsi que la communauté internationale forcèrent Mr. Kabila a ajourner l’objectif de modifier complètement la constitution de façon à se maintenir au pouvoir. La demission force du Président du Burkina Faso Blaise Compaore par un mouvement populaire en Octobre 2014 alors qu’il cherchait à modifier la constitution de son pays a vraisemblablement lancé le signal du danger de sa tentative et de son aspect hasardeux à Kabila. 

2. Différer par l’intermédiaire du recensement et des lois électorales. – wavec la voie constitutionnelle bloquée, Mr. Kabila a ensuite tenté de modifier les lois électorales congolaises de façon à ce qu’un recensement ( de nombreux experts affirmant qu’il faudrait trois à quatre ans pour organiser un recensement, repoussant donc la tenue des élections au plus tôt en 2018) serait exigé avant l’organisation des élections. Un mouvement populaire a éclaté entre le 19 et le 22  Janvier 2015 à Telema, entraînant la mort de 42 personnes provoquée par les forces de sécurité de Kabila mais réussissant à repousser son effort. Le gouvernement a été forcé de retirer cette loi qui exigeait un recensement avant les élections.

3. Encombrer le calendrier électoral  - sous des pressions internes et externes croissantes  pour établir un calendrier pour les élections la Commission électorale nationale indépendante [Independent National Electoral Commission (CENI)] a publié un calendrier fantaisiste comprenant toutes les élections, des municipales aux présidentielles, donnant priorité aux régionales et aux municipales avant la fin de 2015. Aucune prévision dans ce calendrier n’a été respectée. De nombreuses figures de l’opposition ont argument que les municipales et régionales pouvaient attendre 2016, et donc libérer la programmation électorale afin d’organiser effectivement et complètement les élections présidentielles.

4. Création de nouvelles provinces (découpage) – Au milieu de la programmation des élections, la coalition majoritaire poussa vers une loi demandant le création de nouvelles provinces (de 11 à 26) par la constitution de 2006. La loi n’avait pas été mise en œuvre depuis huit ans que Kabila était au pouvoir sous l’actuelle constitution. (L’actuelle constitution a été ratifiée en Février 2006, cinq années après que Joseph Kabila ait pris le pouvoir, après l’assassinat de Laurent Désiré Kabila en 2001) De nombreux observateurs virent ceci comme une autre tentative de repousser les élections de 2016, considérant spécialement que la commission électorale n’était pas en position d’organiser des élections dans ces nouvelles provinces. En dernière analyse, les élections ne furent pas tenues dans ces provinces nouvelles, cependant, à travers un règlement controversé, Kabila fût à même de désigner des commissionnaires pour leur gestion.

5. Insuffisamment financer la commission électorale nationale : – La CENI a récemment declare qu’elle n’avait pas les moyens d’organiser des élections et plus tard a déclare que le gouvernement n’avait finance qu’un petit pourcentage du budget d’organisation des élections. La CENI dit que le gouvernement n’a financé que 24% du budget en 2014 et 22% depuis 2015. L’absence de support gouvernemental est considéré comme une des stratégies du régime de Kabila  pour ralentir le processus et atermoyer les élections comme un fait accompli. 

6. Le dialogue national – après avoir échoué à créer un consensus national lors de la consultation nationale de 2013, Kabila est revenu à un modèle identique sous le déguisement du dialogue national. Ceci représente ses dernières tentatives pour établir sa légitimité de se maintenir au pouvoir au-delà de Décembre 2016. Un partenaire peu probable dans ce dialogue est le principal parti de l’opposition l’UDPS. Une coalition de forces d’opposition sous le nom de"Dynamic for Unified Action of the Opposition [Dynamique pour l'unité d'actions de l'opposition] ainsi que le Group of Seven  or G7 ( un groupe dissident formé de partis différents de la majorité de Kabila) ont boycotté ce dialogue en le voyant justement comme une dernière tentative de Kabila pour se maintenir au pouvoir. En fait, le G7 et la Dynamique d’opposition ont appelé à des manifestations et accroissent leur pression sur le régime de Kabila afin qu’il respecte la constitution.

Afin de comprendre les racines de l’actuelle incertitude politique et de l’instabilité, il est vital que soit clair le but central de Kabila qui est de rester au pouvoir. Il sait qu’il ne peut se maintenir au pouvoir uniquement par la force, c’est pourquoi il tente n’importe quelle forme de légitimité dans sa folle poursuite du pouvoir. Ses options sont de plus en plus limitées et à la fin, ses démarches vont certainement échouer. Une des raisons majeure qui limite les options de Kabila est en partie due à la pression qu’exerce la population sur lui. Les Congolais de toutes obédiances sont unis dans leur determination de voir la constitution respectée et que le Président Kabila cede son siege en Décembre 2016. Il y a une insatisfaction presque totale à l’égard de son gouvernement et un accord étendu sur le fait qu’il doive respecter la constitution et abandonner la présidence. 

L’Eglise catholique (voir la declaration du 24 Novembre), l’opposition politique, le G7, les organisations de la société civile, les formations de la jeunesse et les anciens membres du parti politique de Kabila ainsi que le gouverneur de la province du Katanga, Moïse Katumbi  ont appelé la Président Kabila à respecter la constitution et à se retirer à la fin de son mandat.

La jeunesse a payé un prix particulièrement élevé en sang et en pertes humaines.  Elle a été abattue dans les rues, arrêtée, exile et privée de ses droits constitutionnels à se rassembler pacifiquement. Même lors du rassemblement bénin pour protester contre l’augmentation des frais de scolarisation, les forces de sécurité ont été appelées et ont lancé des gaz lacrymogènes tout comme cela avait été  fait récemment avec les étudiants de l’Institut supérieur d’architecture et d’urbanisme de Kinshasa.

Comme Joseph Kabila entre dans la dernière année de sa présidence, la pression s’accroît afin qu’il respecte la constitution et libère son siege en Décembre 2016. Les Congolais sont unis dans la défense de la constitution et la protection des avancées de la république naissante qui adviennent dans la période d’après-guerre de ce pays. Si les élections sont bien tenues en 2016n, ce sera grâce à la vigilance et à la pression provenant des filles et des fils du Congo.
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